Enseignements des confins : Petite danse des points de vue multiples (2/3)

Publié le 28 décembre 2024

Pendant la pandémie de Covid-19, avec mes étudiantes de l’atelier de Design d’espace de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Lyon, nous avons pratiqué de nouvelles façons de faire cours, par la notation, la danse et la cartographie. Petite leçon de danse à distance.

par Sonja Dicquemare
Architecte, chorégraphe et professeure à l’ENSBA (École Nationale Supérieure des Beaux-Arts) de Lyon


Vendredi, 3 avril 2020

Je vous donne ici non pas des choses à faire, mais plutôt des choses que moi j’ai faites. Ce sont des propositions à envisager la situation confinée à travers nos pratiques. Il y a une carte et une danse, c’est un genre de méthode d’intensification de l’espace à travers des actes et des représentations.

J’ai d’abord créé la petite danse des points de vue multiples. Cette séquence de 12 mouvements nous permet de prendre 12 photos en tournant sur nous-même et en dissociant l’appareil photo de l’œil. Le geste de voir prend son autonomie, on regarde avec tout le corps, unissant ainsi l’espace qui nous entoure et l’espace que nous portons en nous. Dans la partition, chaque position de prise d’image est définie ainsi que le mouvement qui permet de passer d’une position à une autre. Sur 360° : la dernière image est en écho à la première, elle prend à peu près la même vue mais dans une orientation latérale et non plus frontale. Les images 6 et 9 : l’une attrape le sol, l’autre le ciel. Dans les images 7 et 8, un fragment du corps crée un premier plan. Le corps est très orienté : 4 directions perpendiculaires sont successivement investies (ça évoque les points cardinaux et le TaiChi).

L’appareil photo a un positionnement précis (sauf dans les vues en mouvement 10 et 11). Il est complètement détaché du regard dans plusieurs postures, par contre il reste la plupart du temps dans le plan vertical : sauf dans les vues 6 et 7 - ciel et sol - où il est à l’horizontale. Dans la vue 8, l’appareil photo peut-être légèrement incliné, il se positionne non plus par rapport à l’axe du corps dans l’espace, mais dans sa relation avec la main.

Précision des ancrages et des mouvement, respiration et unité du corps dans l’instant, et dans cette relation à l’alentour, qui passe par l’appareil photo – que vous pouvez considérer tantôt comme une sorte de marionnette – votre double au regard élargi – tantôt comme l’arc dans le Kyudo, où il ne s’agit pas de viser mais d’harmoniser les énergies.

Testez ça dans diverses sortes d’espace, à divers moments. Organisez-vos séries d’images dansées de manière à les mettre en dialogue, et qu’on puisse les lire horizontalement (chaque ligne est une danse) ou verticalement (chaque ligne est le même cadrage à différents moments) Vous moissonnerez des lignes de ciels, des lignes de mains ou de sol, des lignes sautées... On peut aussi tester les liens avec d’autres corps en action, en voyant les points de jonction, les interférences.

En aparté, un prolongement : En février 2022, j’ai enseigné cette petite danse par visioconférence à mes étudiantes de l’école E-Art/Republics of arts à Hangzhou (Chine), à 9846Km. Conduites par SUN Haiwei, iels en ont donné une version collective sur le toit de l’école :

Sonja Dicquemare


Textes, partition, photographies : Sonja Dicquemare.
Activation à Hangzhou et photographies dansées : Sun Haiwei, Ding Zifu, Tang Yiqian, Xia Shuang, Zhang Bojun, Zhang Jianwei, Zhang Shuran, Mu Kejing.
Bandeau : Strasbourg, 2021, mesure de distanciation dans un magasin. Photographie : Nepthys Zwer.
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